Pascal Griset et Léonard Laborie.
" Historiographie et réinvention du vignoble de Cahors, XXe-XXIe siécles " / "Historiography and the Reinvention of the Cahors Vineyard in the 20th and 21st Centuries" / "Historiografía y reinvención de los viñedos de Cahors, siglos XX y XXI".
RIVAR Vol. 3, N° 7, ISSN 0719-4994, IDEA-USACH, Santiago de Chile, enero 2016, pp. 81-102.


Artículos

Historiographie et réinvention du vignoble de Cahors, XXe-XXIe siécles

Historiography and the Reinvention of the Cahors Vineyard in the 20th and 21st Centuries

Historiografía y reinvención de los viñedos de Cahors en los siglos XX y XXI

 

Pascal Griset* Léonard Laborie**

*Professeur d'histoire contemporaine, Université Paris-Sorbonne. Directeur de l'Institut des sciences de la communication (CNRS, UPMC, Paris-Sorbonne), Paris, France. Correo electrónico: pascalgriset@yahoo.fr

**Chargé de recherche au CNRS, UMR Sirice (CNRS, Université Paris 1, Université Paris-Sorbonne), Paris, France. Correo electrónico: leonard.laborie@cnrs.fr


Résumé

Cet article interroge les enjeux sous-jacents á l'écriture de l'histoire du vignoble de Cahors aux XXe et XXIe siécles. Historiographique et réflexif á la fois, il examine comment sont allées de pair la mise en récit historique et la réinvention d'un vignoble qui avait totalement changé de visage aprés diverses crises phytosanitaires et climatiques. Il indique par ailleurs des directions de recherche future á la lumiére des travaux passés et des questions posées par les acteurs contemporains.

Mots-clefs : Cahors, malbec, historiographie, identité.


Abstract

This article focusses on the issues at stake in writing the history of the vineyards of Cahors in the 20th and 21st centuries. Historiographical and reflexive at the same time, it examines how historical storytelling went hand in hand with the reinvention of a vineyard which various phytosanitary and climate crises had completely changed. It also indicates directions for future research in the light of past work and questions asked by contemporary actors.

Key words: Cahors, malbec, historiography, identity.


Resumen

Este artículo se enfoca en aventurar interrogantes sobre la historia de los viñedos de Cahors en los siglos XX y XXI. Historiográfico y reflexivo al mismo tiempo, examina cómo la narración histórica y la reinvención de los viñedos, después de pasar por diversas crisis fitosanitarias y climáticas, ha cambiado totalmente, a partir de factores estrechamente relacionados. Se indican además directrices para futuras investigaciones, bajo la luz de trabajos previos y cuestionamientos de diversos actores contemporáneos.

Palabras clave: Cahors, malbec, historiografía, identidad.


 

« Malbec will make it big. By the year 2015, the greatness of Argentinean wines made from the Malbec grape will be understood as a given. This French varietal, which failed so miserably on its home soil in Bordeaux, has reached startling heights of quality in Argentina. Both inexpensive, delicious Malbecs and majestic, profoundly complex ones from high-elevation vineyards are already being produced, and by 2015 this long-ignored grape's place in the pantheon of noble wines will be guaranteed » (Parker, 2004).

Nous y sommes : 2015 vient de s'achever, et l'on peut dire que Robert Parker, il y a dix ans de cela, faisait une prédiction importante. Prédire l'avenir est un moyen de le faire advenir, et la septiéme des douze annonces du plus célébre des prescripteurs contemporains a sans doute beaucoup fait pour le succés du malbec argentin. Elle a sans doute beaucoup fait aussi, sans le vouloir, pour le malbec fra^ais de Cahors. Dans cet article, nous nous tournons en symétrie vers l'autre forme de récit qui permet de construire l'avenir, celui qui porte sur le passé.

En mars 2014, l'Union interprofessionnelle du vin de Cahors nous a confié un projet de recherche historique. Ambition et rigueur le caractérisent : nous disposons de quatre années et de l'assurance du plein respect des méthodes et des résultats de la discipline historique pour retracer l'histoire du vignoble de Cahors et de son cépage emblématique, le malbec, du Moyen Age á nos jours. Il n'en reste pas moins vrai que, pour les producteurs de Cahors, ce projet présente un intérét non seulement intellectuel mais stratégique.

Né d'une rencontre fortuite á l'occasion de l'organisation á Paris d'un concours ludique de dégustation de vins sur le théme de la circulation des cépages et des techniques de vinification, en clóture du colloque biennal du réseau international d'historiens Tensions of Europe. Technology and the Making of Europe, from 1850 to the Present (www.tensionsofeurope.eu), il a en effet du cóté de Cahors des racines plus profondes. Le triptyque stratégique retenu pour relancer l'appellation á partir de 2007 - terroir, malbec, noir - mettait l'histoire ou á tout le moins l'imaginaire historique au premier plan en renvoyant au « malbec de légende » et au « black wine » médiéval, et en racontant le « roman du vin noir », pour reprendre le titre de l'essai d'histoire romancée confié á Jean-Charles Chapuzet (Chapuzet, 2008).

 

« Cahors Malbec de Légende. Cahors Vin Noir ». Affiche (2007). © UIVC

De lá émergea bientót un souci de mieux contróler l'histoire racontée, au double sens d'en authentifier le contenu et de s'en approprier la production. Question de principe : pour recharger le contenu historique de la marque collective, le brand content, de l'appellation Cahors, il fallait des arguments robustes. Question d'image aussi : un raccourci historique s'imposait dans la presse et chez les amateurs, faisant de Cahors et du cépage malbec un échec en France depuis les années 1800. Déjá présent dans la prédiction de Robert Parker citée en ouverture de ce texte, il se retrouvait condensé dans une formule qui ne pouvait déplaire aux producteurs argentins : « From failure in France to a star in the New World » (Nugent, 2011). Cette perspective historique passait sur les efforts sans doute plus paralléles et convergents que consécutifs des deux cótés de l'Atlantique. Durant la seconde moitié du XXe siécle en effet, le choix du malbec n'était allé de soi ni pour l'un ni pour l'autre vignoble, et peut-étre encore moins pour Mendoza que pour Cahors. Surtout, cette perspective établissait une image sur laquelle l'appellation française n'avait plus prise.

Entre mythes glorificateurs et raccourcis dépréciatifs, grandit le besoin de faire la part des choses sur l'histoire du vignoble de Cahors. D'autres motivations s'ajoutérent probablement : aligner sur ce point les discours de tous ceux qui promouvaient l'appellation, ressouder et requalifier un collectif divisé, accompagner les vignerons désireux de renouveler leurs pratiques en explorant les anciennes, fournir des arguments dans les négociations internes et externes autour de nouveaux projets de hiérarchisation ou de diversification des vins labellisés. Tel est ce qui compose l'intérét stratégique des producteurs et négociants de Cahors á explorer aujourd'hui leur histoire.

Ce contexte de demande nourrit notre travail, en permettant l'accés á de nouvelles sources, notamment orales, et il le stimule, en le piquant des questions du temps présent. Mais il nous convainc aussi davantage encore de la nécessité d'écrire et de publier une histoire critique, qui fasse la lumiére de maniére apaisée tant sur ce qui est en partage que sur ce qui divise, sur ce qui assoit la réputation de Cahors et sur ce qui la relativise, sur ce que furent les réussites et les échecs du vignoble, individuels ou collectifs. Et pour en revenir á l'objet méme de ce numéro de RIVAR, il faut aussi étre clair d'emblée sur le fait que Cahors et malbec ne sont pas co-extensifs. L'histoire du vignoble de Cahors ne tient pas dans celle du malbec et réciproquement, au moins jusqu'á l'époque trés récente du Cahors Malbec.

Conscients des enjeux au présent de l'histoire que nous avons á écrire, nous en sommes venus á poser la question de l'enjeu de l'écriture de l'histoire du vignoble par le passé. Dans cet article, nous interrogeons ainsi l'histoire de l'histoire du vignoble, et traçons en particulier les relations entre enquétes sur le passé et transformations du vignoble au cours du XXe siécle. Quelle influence le vignoble a-t-il eu sur l'historiographie et symétriquement quelle cause l'écriture de l'histoire a-t-elle servi au-delá, le cas échéant, de la connaissance et du savoir ?

 

L'écriture de l'histoire et la réinvention du vin de Cahors, du phylloxéra aux années 1970

« La « tradition millénaire de la vigne », valorisante en termes d'image, ne signifiait plus rien dans les années 1960, en dehors de quelques vrais vignerons, qui pouvaient se compter sur les doigts d'une seule main » (Tulet, Velasco-Graciet, 2008 : 110). Le décalage entre la quasi disparition du vin de Cahors au milieu du XXe siécle et l'abondance des références historiques qui depuis sa « résurrection » inscrivent les producteurs contemporains dans la continuité d'une tradition bimillénaire n'a pas échappé aux géographes. Ce discours de « légitimation historique » tend en fait á poser que la production viticole de qualité est dans la nature ou le génie du lieu (Tulet, Velasco-Graciet, 2008 : 103). Nous verrons depuis quand et comment ce discours opére, en insistant sur le fait qu'il traverse en réalité tout le siécle, et que ne s'y joue pas qu'une question d'image.

Dans les années 1900, la viticulture française est en crise, sanitaire et économique. Aprés les ravages du phylloxéra, pointe une crise de mévente. L'une des solutions avancées par les vignobles les plus réputés est la lutte contre la fraude et la délimitation des appellations (Stanziani, 2004). A Bordeaux, les débats vont bon train sur les limites géographiques de l'aire : jusqu'oú pourra-t-on revendiquer la production de vins de Bordeaux ? Deux conceptions s'affrontent. D'un cóté, celle des producteurs, négociants et élus du département de la Gironde, unanimes pour une délimitation circonscrite á ce méme département. De l'autre, celle des vignobles contigus, qui, anticipant un grand bénéfice commercial, revendiquent l'usage de cette marque prestigieuse pour leur production. Face á l'incapacité á trouver un accord politique entre ces acteurs, les autorités préconisent un recours á des critéres objectifs, á trouver dans le droit et l'histoire, davantage d'ailleurs que dans la géographie ou l'économie. Cette décision suscite de multiples études historiques, nourries par une mobilisation á tous les niveaux, changeant l'état des connaissances sur les vignobles concernés (Roudié, 1994). Producteurs détenteurs d'archives, syndicats d'agriculteurs, archivistes départementaux, érudits et professeurs des deux partis engagent par articles et rapports interposés une vive discussion orientée par leurs intéréts, sur le passé et les interprétations á en faire (Roudié, 2014 : 190). Les plus mobilisés sont les vignobles de Bergerac, de Marmande et de Gaillac, qui mettent en avant l'importance quantitative et qualitative de leurs vins dans l'histoire du commerce bordelais, et réciproquement l'importance des priviléges de Bordeaux dans la dynamique de leur vignoble. Pour eux, l'histoire montre que depuis le Moyen Age, Bordeaux et tous les vins drainés par le bassin de la Garonne et de la Dordogne ont un destin partagé. Une vaste appellation Bordeaux serait le moyen de prolonger ce destin d'une nouvelle maniére. Les travaux récents confirment que ces vignobles composaient depuis le Moyen Age l'hinterland d'une région aquitaine commandée par la place girondine (Lavaud, 2013). Cette situation en amont de Bordeaux valait á leurs vins l'appellation usuelle de « vins de haut » ou « vins du Haut-Pays ». Le chevalier Louis de Jaucourt expliquait ainsi dans les années 1760 que ces derniers représentaient « toutes sortes de crüs, qui se recueillent au-dessus de Saint-Macaire, qui est á 7 lieues au-dessus de Bordeaux. On les nomme ainsi pour les distinguer de ceux qui se font dans la sénéchaussée de Bordeaux, qu'on appelle vins de ville » (Jaucourt, 1765).

Le vignoble de Cahors appartient pleinement á cet ensemble dit du Haut-Pays, étant drainé par la riviére Lot vers la Garonne. Mais il n'est pas directement contigu aux vignobles qui font la réputation de Bordeaux. Cahors se trouve á un peu plus de 150 kilométres á vol d'oiseau de la capitale girondine. Qu'importe. Sans doute encouragées par les démarches de leurs voisins, y compris ceux plus lointains encore de Gaillac, les autorités politiques du département du Lot, dont Cahors est la préfecture, plaident á leur tour en ces années 1908 1911 en faveur de leur inclusion dans l'aire á délimiter. Président du Conseil général, Anatole de Monzie semble particuliérement concerné. Philippe Roudié note toutefois deux originalités, propres á ce territoire : d'une part la faible mobilisation des producteurs, d'autre part l'absence d'unanimité, certains rejetant fermement le projet, comme notamment le docteur Cassaignes, de Puy-l'Evéque (Roudié, 2014 : 292-294). Il attribue la premiére á l'état de grande fragilité, si ce n'est de déliquescence, d'un vignoble terriblement frappé par le phylloxéra. Face á la difficulté á trouver un porte-greffe adapté au cépage, face au manque de bras, dü á une émigration intense, et á un manque de capitaux, dü au morcellement des exploitations, les cultivateurs optent pour les hybrides. Dans ces conditions, candidater á l'appellation bordelaise pouvait paraitre vain. L'autre originalité, l'opposition de certains á se fondre dans Bordeaux, « trés inhabituelle á l'époque », révélerait selon Philippe Roudié une forte identité viticole locale, que confirment d'une certaine maniére les initiatives précoces, quoique hésitantes, pour l'obtention au méme moment du cru Cahors (Roudié, 2014 : 294).

La période médiévale est au coeur de l'identité de Cahors et de l'imaginaire historique de ses vins.
Fuente: Jéróme Morel. "Pont Valentré". Cahors, 2015

Nous pouvons quant á nous souligner une troisiéme originalité, qui recoupe les deux premiéres : l'absence de travaux historiques suscités par ce débat. Alors qu'ailleurs les recherches sont intenses et l'histoire directement mobilisée, tel n'est pas le cas á Cahors.

Pourquoi ? Par manque de mobilisation des producteurs peut-étre, mais paradoxalement aussi sans doute par la précocité de l'interrogation sur les relations historiques entre Cahors et Bordeaux. Dés 1904 en effet, un article publié á Cahors dans le Bulletin de la Société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot avait présenté l'histoire moderne des vins de la région du Quercy, dont font partie ceux de Cahors, á travers la focale bordelaise (Laroussilhe, 1904). Son auteur, Ferdinand de Laroussilhe (1852-1919), républicain convaincu, romancier, poéte et historien quercynois, fonctionnaire á Cahors, y avait dépeint l'étranglement des vignerons du Quercy, discriminés réglementairement et fiscalement, par les marchands de la place bordelaise. L'auteur revenait sur un dossier ouvert déjá en 1894 dans ce méme Bulletin, avec la publication d'une supplique des habitants du Quercy au roi de France, datant des années 1760 et dénonçant l'abus des priviléges de Bordeaux (Gransault-Lacoste, 1894).

Jusqu'á leur suppression á la fin des années 1770, définitivement acquise avec la Révolution, ces priviléges avaient de fait permis aux Bordelais de donner la priorité á leurs propres vins sur les marchés qu'ils desservaient, domestiques et étrangers. Quant aux vins descendus de l'amont par la voie fluviale, ils savaient aussi en tirer profit en les revendant ou en les utilisant pour améliorer la production locale, par coupage. Laroussilhe ne prend pas position dans le débat sur la délimitation de l'aire Bordeaux. Et pour cause : il n'a pas encore eu lieu. Mais, vantant le sens « des idées de justice et d'indépendance » (Laroussilhe, 1904 : 272) des Quercynois, il conclut de telle maniére qu'aprés sa lecture, toute idée d'inclusion de Cahors dans le Bordelais pouvait paraitre comme une insulte á la mémoire des générations passées de vignerons du Quercy, et encore comme une insulte au patriotisme, considérant l'alliance historique de Bordeaux avec l'Angleterre :

Les bourgeois, le parlement et les commerçants de Bordeaux sont ceux qui ont fait le plus de mal au Querci, et le Querci est pourtant la province qui a le plus contribué á la fortune de la capitale de la Guyenne. [...] Notre terre - tant pis si nous nous répétons - a souffert pendant trois cents ans de la domination des Anglais d'Angleterre et trois cents ans de la tyrannie de la cité de Bordeaux (Laroussilhe, 1904 : 282-3).

Précocité et esprit d'indépendance : avant les autres semble-t-il, et avant que la question du ralliement ne fut ouvertement posée, le vignoble du Quercy avait suscité chez un des hommes du pays un exposé des relations historiques avec Bordeaux ouvrant á une conclusion radicalement opposée á celle qu'en tireraient bientót les élites politiques lotoises et les autres vignobles du Haut-Pays. Si l'emprise historique de Bordeaux sur les vins du Haut-Pays pouvait étre présentée comme un argument pour l'inclusion des vins de Cahors et d'autres régions dans l'aire d'appellation Bordeaux, l'abus des priviléges auxquels elle avait donné lieu pouvait inversement nourrir un ressentiment et légitimer un refus, un peu plus d'un siécle aprés leur extinction. Ce type de réaction convenait bien aux Girondins, qui soulignaient par ailleurs que sous le nom de vins du Haut-Pays s'étaient écoulées des productions d'origines de plus en plus diverses, allant jusque dans le Languedoc.

Le débat est long et controversé, certaines décisions sont remises en cause, mais celle arrétée en 1911 demeure aujourd'hui en vigueur : l'aire d'appellation Bordeaux sera limitée au département de la Gironde. Les vins originaires d'autres départements, ceux du Haut-Pays, en seront donc exclus. Dés lors, ces vins de haut se trouvent seuls face á eux-mémes pour penser leur identité. Une perspective les y presse bientót, celle de bénéficier á leur tour d'une personnalité juridique, ouvrant á une protection de leur appellation. Deux lois complémentaires en mai 1919 et juillet 1927 permettent á des productions viticoles françaises d'origine certifiée et respectant des critéres de production de se voir reconnaitre une personnalité juridique par décision de justice. Ainsi s'ouvre une décennie aprés l'affaire de l'appellation Bordeaux le deuxiéme moment de mobilisation de l'histoire. Il durera plus longtemps.

Deux générations s'attellent á reconstruire, dans les textes et sur le terrain, un vignoble en voie de disparition. Nous retrouvons Anatole de Monzie, député et maire de Cahors, et avocat de profession, aux cótés cette fois du Syndicat de défense du vin de Cahors constitué en 1929. Ce dernier obtient rapidement gain de cause. En 1930, le tribunal civil de Cahors juge que « les vins rouges de Duravel comme tous ceux récoltés sur les cótes du Lot et sur les plateaux avoisinants ont droit á l'appellation d'origine « Vin de Cahors » » (Baudel, 1984 : 149). Pour des raisons qui restent á clarifier, le Syndicat passe á cóté de l'appellation d'origine contrólée (AOC), instituée en France par décret-loi en 1935. Au lendemain de la Deuxiéme Guerre mondiale, les vignerons qui continuent de croire dans le potentiel économique du vin de Cahors s'engagent dans une procédure sinueuse de labellisation en Vin Délimité de Qualité Supérieure (VDQS). Ils avaient obtenu pendant la guerre leur classement en « Vin de Coteaux ». La nouvelle catégorie des VDQS codifiait ces vins de coteaux non AOC. La démarche aboutit définitivement en 1951.

Au cours de la procédure, la réglementation de l'appellation se précise nettement. Il est notamment arrété dés 1946 que le cépage dominant, le malbec appelé localement auxerrois, mentionné dans le jugement de 1930 sous ce dernier nom aux cótés du gros auxerrois, du dame noire et du mauzac, doit entrer á 70% au minimum dans la composition du vin de Cahors. Cet élément est repris dans le cadre de l'AOC, obtenue vingt ans plus tard, en avril 1971. La demande d'accés au sommet de la pyramide du classement des vins français avait occasionné un débat et des réserves semble-t-il chez certains vignerons (Baudel, 1984 : 149). Son issue positive marque un tournant en ce qu'elle rend presque irreversible et accélére les mutations déjá amorcées, en ouvrant de nouvelles possibilités de développement.

Durant toute cette période, l'histoire aide ceux qui cherchent á convaincre leurs interlocuteurs - les producteurs, les pouvoirs publics, les tribunaux et les experts de l'Institut national des appellations d'origine - du bienfondé de leur démarche. Ce n'était alors que « quelques apótres » á peine, pour reprendre la formule de José Baudel, fils de l'un d'entre eux, « quelques pionniers tenaces qui persistaient á dire contre vents et marées que le Cahors devait redevenir la vraie richesse fonciére de notre région » (Baudel, 1984 : 169, 173). Le discours sur l'histoire permet á ces hommes d'entretenir la flamme identitaire des vins de Cahors, et concrétement de porter la preuve des « usages locaux, loyaux et constants » fondant en droit la légitimité de leur entreprise. Les attendus du jugement de 1930 fondent ainsi d'abord la décision sur l'histoire :

il est notoire que la dénomination « Vin de Cahors » existe effectivement, que cette dénomination est établie par les usages locaux, loyaux et constants qui n'ont fait que continuer une pratique séculaire ; [...] la documentation historique versée aux débats démontre que, depuis l'époque romaine jusqu'á nos jours la région de Cahors a toujours été un pays de vignobles qui a donné un vin ayant des propriétés particuliéres et son originalité ; [...] il ressort de la documentation offerte que l'appellation de « Vin de Cahors » est fort ancienne, qu'elle a sans doute été employée dés le Moyen Age, qu'en tous cas, elle est déjá en usage dans des circonstances presque officielles á l'époque de la Renaissance pour se maintenir dans les siécles suivants (Cité dans Baudel, 1984 : 148).

Suivent les références qui restent á ce jour parmi les marqueurs principaux du récit historique sur le vignoble : aprés les Romains, le Moyen Age, oú l'appellation déjá « a sans doute été employée », Frangois Ier et sa vigne de Fontainebleau plantée par un vigneron et avec « des cépages » de Cahors, Arthur Young et son récit de voyage dans le pays en 1787. La décision de classement VDQS intervient pour sa part « aprés expertise, délimitation parcellaire, nouvelles preuves de l'historicité et établissement des régles de production » (Baudel, 1955b : 323).

Parmi ceux que nous pourrions appeler les metteurs en récit historique, comme il y a les metteurs en marché économique, deux figures émergent. Celle d'Ernest Lafon (1874-1946) d'abord. Instituteur á Albas, commune au coeur du vignoble de Cahors oú il développe des enseignements visant á améliorer le sort des agriculteurs locaux, il est par ailleurs un actif écrivain régionaliste. Au cours des années 1920 et 1930, il publie de nombreux articles dans la presse régionale qui rappellent la grandeur passée de ce vignoble. « Les vins de Cahors. Les glorieuses origines de nos vins remontent aux Gaulois et affirment leur antique réputation » : ce titre de novembre 1927 rend á lui seul compte de la perspective (Lafon, 1927). Sur ce registre, Ernest Lafon n'est pas seul. Un dénommé Chéry publie aussi dans le Journal du Lot une série d'articles, par exemple sur « Frangois Ier et le vin de Cahors » (Chéry, 1930). En 1937, Lafon synthétise et compose un guide touristique, qu'il qualifie dans sa dédicace aux souscripteurs d'« hymne á la gloire du Quercy et du « Vin de Cahors » » (Lafon, 1937a). La mention de ce dernier entre guillemets montre á quel point elle fait écho aux démarches contemporaines de reconnaissance de l'appellation. L'engagement de l'auteur pour cette cause, qu'il estime étre la cause d'une génération, ne fait pas de doute : « En nous désintéressant de cette question, nous mériterions la malédiction de nos ancétres et nous porterions devant les générations futures la lourde responsabilité de notre bétise et de notre incurie ou de notre égoíste aveuglement » (Lafon, 1937b). Origínale car sans connexion apparente avec les préoccupations des vignerons est la contribution du chanoine Eugéne Sol, archiviste diocésain á Cahors, qui, inspiré des travaux d'histoire économique d'Ernest Labrousse, s'intéresse au méme moment á l'évolution du prix du vin produit dans le Quercy avant la Révolution frangaise (Sol, 1939).

José Baudel (1927-2005) est l'autre figure de la période, la principale sans doute. Natif de la région, il ne peut rester sur l'exploitation familiale et part se former á l'agronomie á Montpellier. Quand il revient á la fin des années 1950 pour prendre la direction de la cave coopérative fondée par ses aínés une dizaine d'année auparavant, le contexte est trés particulier. Le vin de Cahors n'est plus qu'un vin de papier. Il existe désormais bien légalement, mais les vignes qui le produisaient tant bien que mal ont quasiment disparu. A trois reprises en effet, á l'hiver 1956 et au printemps 1957, de sévéres gelées ont détruit presque totalement les derniers pieds de malbec, plus sensibles que les autres. L'histoire n'est certes pas la priorité, mais elle aide dans le vaste chantier qui s'ouvre alors : il s'agit ni plus ni moins que de réinventer un vignoble dont 1 % á peine de la production reléve de l'appellation VDQS Cahors en 1958 (Baudel, 1968 : 52).

José Baudel a une haute conscience de l'historicité de son vignoble natal, dont il retrace les grandes étapes á 28 ans déjá, en 1955, dans un court article paru dans un hebdomadaire spécialisé, et dont la conclusion est un véritable programme de rénovation du vin de Cahors (Baudel, 1955a et 1955b). En s'appuyant sur les écrits d'Ernest Lafon, sur les sources imprimées du XIXe siécle et notamment la littérature technique qu'il connaít par sa formation, récoltant auprés des habitants des témoignages et des documents, il finit par publier un livre qui a pour matiére principale l'histoire, de l'époque romaine au XXe siécle (Baudel, 1972). Bien qu'il ne corresponde pas aux standards académiques, s'agissant de la problématique, de la structuration du récit ou encore de la présentation de l'appareil critique, il reste aujourd'hui le point d'entrée bibliographique dans l'histoire de ce vignoble. Il a par ailleurs valeur de source pour tout ce qui touche aux années 1940-1970.

Couronné en 1978 par le prix de l'Office international du vin, le livre de José Baudel paraít pour la premiére fois l'année qui suit l'obtention du classement en AOC. A premiére vue, on pourrait déduire de la chronologie que le livre est le fruit de ce classement. Mais le classement, ce qu'il récompense d'efforts des vignerons, ne peut étre séparé d'un travail sur l'histoire et sa mise en récit, qui prend forme dans ce livre. D'abord, l'histoire est un passage obligé dans un dossier de demande de classement AOC. Ensuite, l'histoire sert la stratégie de personnalisation du vin et de commercialisation offensive, adoptée par la cave coopérative á l'arrivée de José Baudel, á travers la mise en bouteille. Lá comme ailleurs, la bouteille portant les marques de ses origines est plus qu'un contenant commode. Elle s'impose comme un outil de valorisation du produit auprés du consommateur (Pitte, 2013).

C'est ainsi que l'on peut faire l'hypothése que la mise en bouteille a fait basculer le récit historique d'un usage de production, en interne, á un usage de consommation, en externe. L'histoire nourrit l'image. C'était sans doute le sens de la préparation et de la publication d'un livre par José Baudel.

Quoi qu'il en soit, un constat s'impose : aprés la crise phylloxérique, ce sont les partisans et méme les artisans de la conversion d'un vignoble de consommation courante en vignoble de qualité qui ont cherché á connaítre et faire connaítre l'histoire pluriséculaire des vins de Cahors. Cette conversion était cadrée par eux comme un retour á un état antérieur qui faisait donc directement du passé une ressource. L'entreprise de reconstruction du présent a ainsi été aussi une entreprise de reconstruction du passé. Cette co-construction du présent et du passé n'avait pas que la curiosité comme ressort. L'histoire a outillé de multiples maniéres ces entrepreneurs, qui avaient pour cause la prospérité d'une région mais aussi une identité collective. Elle a pu les rassurer dans le doute, elle a pu les aider á convaincre la justice et les pouvoirs publics, elle a pu venir á l'appui de leurs démarches vers les producteurs, que seuls les prix de vente, et donc l'adhésion des metteurs en marché et des consommateurs, pouvaient au final faire bouger. Les consommateurs ont donc aussi été ciblés par ces démarches historiques, dans une logique d'assurance quant á la qualité du produit offert et déjá un peu de story telling á la maniére actuelle. Docteur en médecine et pharmacien qui travaillait á l'analyse des vins de Cahors revendiquant le label VDQS, Pierre Gayet ne le cachait pas lorsqu'il écrivait en 1964 : « Les Vins de Cahors ont une histoire, mais aussi une sorte de légende soigneusement tissée et entretenue par des érudits locaux animés de cette ardeur de « supporter » qu'on reconnaít volontiers comme un trait de la mentalité quercynoise » (Gayet, 1964 : 3).

En juillet 1968, la société savante locale, la Société des études du Lot, organisait une séance itinérante sur le théme des vins de Cahors. La journée débutait á la cave coopérative. Le directeur, José Baudel, faisait une visite commentée. Aprés un passage au domaine Delcros de Parnac et sa vigne expérimentale de malbec, la journée se poursuivait au cháteau de Grézels, oú se réunissait réguliérement la Confrérie du vin de Cahors. Créée en 1964, la Confrérie avait déchargé le Syndicat de défense de sa « mission de prestige », á savoir la promotion d' « une image de marque de qualité » (Baudel, 1984 : 197). Pour le président de la Société des Études du Lot, il était clair que l'enjeu était de « rendre aux vins de Cahors tout leur prestige d'antan » (Lagasquié, 1968 : 47). L'image de marque du Cahors passant par le passé, les travaux érudits pouvaient contribuer á la dynamique contemporaine. Tel était le vou que formait le président de la Société, avec la prudence qui s'imposait :

Sans abandonner, bien loin de lá, sa vocation naturelle vers l'érudition classique, elle [la Société des Études du Lot] cherche á se rapprocher de la réalité moderne et á apporter une aide, peut-étre modeste, mais concréte aux principales activités régionales. [.] Nous ne sommes certes pas une agence de publicité mais nous croyons cependant que la large diffusion de notre bulletin, aussi bien en France qu'á l'étranger, dans des milieux distingués, peut apporter une aide non négligeable á un produit si typiquement de chez nous que des circonstances malheureuses ont fait un peu oublier et dont la qualité est flatteuse pour la réputation de notre région (Lagasquié, 1968 : 46).

L'historien médiéviste Jean Lartigaut présente pour l'occasion l'évolution d'une exploitation viticole quercynoise au XVIIIe siécle á partir de belles archives conservées dans sa propriété - texte toujours fondamental (Lartigaut, 1968). Mais la mobilisation érudite reste quasiment sans lendemain. Il faut attendre 1996 pour qu'un article paraisse de nouveau dans le Bulletin de la société savante, consacré encore une fois á la question des relations avec Bordeaux (des Longchamps, 1996).

 

Depuis les années 1970 : un déficit historiographique persistant en dépit d'un nouvel intérét académique

Aprés l'obtention de l'AOC, les vignerons de Cahors ne cessent pas de s'intéresser et, pour étre plus précis, de trouver intérét, á leur histoire. José Baudel s'agace méme un peu de ceux qui la recomposent á leur avantage, chacun pour soi : « maintenant que le pari est gagné, de plus en plus nombreux sont les convertis de la derniére heure », si bien que « les champions des hybrides d'hier se découvrent soudain des promoteurs du Cahors « depuis plusieurs générations » » (Baudel, 1984 : 170, 173). Le texte de José Baudel est plusieurs fois réédité, avec de légers amendements, et est converti au début des années 1990 en bande dessinée (L 'épopée, 1992). Au début des années 1980, un beau livre écrit par un journaliste et illustré de photographies propose une nouvelle synthése, á partir d'une bibliographie élargie et avec un recours, certes limité, aux archives (Capdeville, 1983). Le texte reste quasiment inchangé dans la nouvelle édition qui paraít en 1999, et qui est á ce jour l'ouvrage le plus récent sur le sujet (Capdeville, 1999).

Dans le méme temps, deux associations un tantinet rivales cherchent á pousser plus loin la valorisation du vignoble et notamment son image historique. Les Seigneurs du Cahors d'un cóté et la Chantrerie de l'autre. Emmenés par Alain-Dominique Perrin, « parti en croisade contre les stéréotypes de la région pour restituer á ce vin historique une place de premier rang », dix producteurs, dont la cave coopérative, créent en 1987 l'association Les Seigneurs du Cahors. Persuadée que « dans l'approche du vin plus que dans tout autre domaine, l'image auprés des amateurs est prépondérante », l'association a commandé une étude sur l'image du Cahors qui conclut á un « véritable probléme de communication » ; aussitót l'association publie un ouvrage chez un grand éditeur parisien dont l'objectif est « de rendre au Cahors ses lettres de noblesse (...) de rendre á l'Histoire ce qui lui est dü » (Perrin, Dussert-Gerber, 1988 : 192, 199, 7). L'histoire est appelée á la rescousse de la notoriété. Reprenant le texte de José Baudel, une rétrospective en quatre temps (un « age d'or », fort long puisqu'il va des Romains á la fin du XIXe siécle, la « crise » phylloxérique, le « déclin » et enfin la « renaissance » depuis 1957), précéde le portrait de chacun des dix Seigneurs.

Contemporaine, la Chantrerie associe pour sa part des producteurs de vin et un négociant en truffes, autre production gastronomique remarquable du département.1 Son action de promotion s'allie de maniére originale avec un effort de collaboration avec le monde académique. L'idée vient de l'expérience initiée par Pierre-Jean Pébeyre, diplómé en histoire, qui avait fondé quelques années plus tót le Centre interdisciplinaire de recherche et d'études sur le Quercy. Mais si des bourses sont distribuées á des étudiants, le projet un temps formé d'une vaste étude interdisciplinaire du cépage malbec ne se concrétise pas.

Ceci donne d'autant plus le sentiment d'un rendez-vous manqué que le monde académique resté jusque lá trés peu impliqué avait aussi de son cóté fait un pas vers l'appellation, depuis l'obtention de l'AOC. Constatant que « l'histoire du vin de Cahors reste á écrire », l'économiste Jean Fourastié se désole en 1972 d'y voir l'un de ces « sujets neufs » en mal de vocation universitaire, tandis que de nombreux thésards « ne font que ressasser des thémes cent fois rebattus » (préface á Baudel, 1984 : 7). L'appel est semble-t-il entendu, notamment á Toulouse oú plusieurs théses sont soutenues dans les années qui suivent. Géographe, Jean-Christian Tulet s'intéresse á l'espace lotois (Tulet, 1976). Jean-Lucien Cabirol aborde le vignoble contemporain en économie et droit rural (Cabirol, 1978), Philippe Delvit enquéte sur la navigation sur le Lot á l'époque moderne (Delvit, 1985), á la suite des recherches d'Etienne Baux sur ce méme terrain (Baux, 1984). Plus tard, Eric Rouvellac révéle en géographie physique les terroirs de l'appellation (Rouvellac, 2005). Tous ces travaux sont trés précieux, mais ils ne font pas de l'histoire du vignoble et des vins leur objet principal. Sous la direction d'André Armengaud, Francis Brumont et Rémy Pech, lá encore depuis l'Université de Toulouse, quatre mémoires de maítrise sont réalisés sur les XVIIe-XVIIIe siécles et surtout le XIXe siécle, mais aucun ne débouche sur une thése (Baynac, 1971 ; Bartolomeu, 1994 ; Brenac, 1997 ; Hermet, 2000 ; Miquel, 2000).

En complément enfin, plusieurs études viennent dans les années 2000 éclairer l'histoire récente de l'appellation en tant qu'AOC. Avec son projet avorté de hiérarchisation des crus, et le départ retentissant d'Alain-Dominique Perrin des instances interprofessionnelles, le vignoble de Cahors attire l'attention. Eric Rouvellac rend compte de ce projet et de la thése qu'il a suscitée (Rouvellac, 2002). La géographe Héléne Velasco-Graciet, en collaboration avec d'autres collégues, met en perspective la « refondation » du vin de Cahors depuis la fin des années 1950 et singuliérement l'obtention de l'AOC, á travers quatre articles qui renouvellent les connaissances en insistant sur la construction territoriale de ce vignoble. Elle discerne l'importance et la persistance des lieux communs historiques dans les représentations offertes aux touristes par les guides imprimés, depuis le XIXe siécle déjá -ancrage antique, hauts et bas séculaires, relations á Bordeaux et róle des grands hommes (Velasco-Graciet, 2002). De fait, les récits historiques du XXe siécle présentés plus haut ont puisé á cette source. Mais l'auteur montre surtout comment Cahors est un miroir grossissant des dynamiques et des contraintes qui sculptent les vignobles frangais dans la mondialisation de la fin du XXe siécle. Aprés une croissance « parmi les plus spectaculaires qui soient », se déchaine dans les années 2000 une « crise de croissance identitaire » qui est « l'une des plus violentes connues dans le vignoble contemporain » (Tulet, Velasco-Graciet, 2008 : 103, 112). Dans ce mouvement, la quéte qualitative structurée collectivement depuis les années 1980 (Seigneurs, Chantrerie) et la demande d'une reconnaissance officielle par l'INAO de crus hiérarchisés reléveraient de maniére positive d'une « construction sociale ascendante » d'un nouveau genre (Velasco-Graciet, Eric Rouvellac, 2004 : 87, 94). Joélle Brouard et Jean-Guillaume Ditter livrent eux a posteriori un diagnostic négatif sur les limites de l'AOC Cahors prise comme institution, incapable de concrétiser ce projet de hiérarchisation (Brouard, Ditter, 2012). Le diagnostic est stimulant pour l'historien, les limites étant avant tout pour ces deux auteurs le produit de facteurs historiques. Dans tous ces travaux, la crise des années 2000 est le prisme á travers lequel est envisagée l'histoire récente de l'AOC Cahors.

 

Un programme de recherche

Pour sortir de la crise commerciale et de gouvernance qui marque la premiére moitié des années 2000, le vignoble de Cahors s'engage á partir de 2007 dans une stratégie marketing rénovée autour du triptyque terroir, cépage et couleur noire. Le vin noir, ce « black wine » qu'auraient tant aimé les Anglais au Moyen Age, est mis en avant, ainsi que, sous un nom qui n'était guére usuel localement, le malbec.

La stratégie paye, le cours se redresse, les exportations s'accroissent, on cesse d'arracher. C'est dans ce contexte que Patrice Foissac, président de la Société des Études du Lot, signe en 2014 un article qui révéle enfin l'intérét d'une étude sérieuse du vignoble de Cahors á la fin du Moyen Age. Les précautions de sa note liminaire sont inversées par rapport á celles de son homologue de 1968. Son probléme n'est plus de ne pas blesser l'honneur de l'érudition en promouvant le vignoble, mais de ne pas blesser le vignoble en promouvant l'érudition. « Nous sommes conscients d'apporter un éclairage dont la sincérité ne sera peut-étre pas appréciée de tous, tant les mythographes ont été actifs en ce domaine -commerce oblige. Mais notre but n'est pas davantage de déprécier un vignoble et sa production auxquels nous sommes trés attachés » (Foissac, 2014 : 125). Effet d'une mobilisation excessive de l'argument historique dans un récit des origines biaisé, de la part des vignerons et de l'interprofession ? Les références au « black wine » agacent le médiéviste, qui n'en trouve pas trace au siécle d'or quercynois. De méme les raccourcis ou les distorsions, qui font replanter le domaine royal de Frangois Ier en malbec, tandis qu'on ne fit entrer ce cépage dans la vigne royale que parmi d'autres plants. Entre l'histoire savante et l'histoire communiquée, qui n'est clairement pas d'origine récente, le fossé se creuse. Face aux aises que prend la seconde, qui arrondit, enjolive et parfois invente, la premiére se raidit et décape. Mais á les lire toutes les deux, elles ne paraissent pas irréconciliables. D'un cóté, nous l'avons vu, les mythes s'expliquent et font partie de l'histoire. De l'autre, les matériaux étudiés par Patrice Foissac témoignent d'un passé vitivinicole extrémement riche, á verser au dossier de l'historicité singuliére du vignoble de Cahors.

Arrivant sur ce terrain, nous faisons le constat de travaux historiques de type académique finalement peu nombreux. Ce qu'écrivait Jean Fourastié en 1972 vaut encore largement aujourd'hui. En 1981, frappé par l' « indigence des travaux sur ce théme », Jean Lartigaut qui le premier pourtant y avait, comme nous l'avons vu, consacré un long article scientifique, concluait sur la méme note : « l'histoire de la vigne en Quercy reste á écrire » (Lartigaut, 1981 : 13, 11). En 2010, rien n'a vraiment changé selon l'historien Jean-Pierre Poussou, pour qui il n'y a toujours pas á ce jour « d'ouvrage d'un réel intérét scientifique sur l'histoire du vin de Cahors » (Poussou, 2010 : 188). Si la plupart des vignobles du Haut-Pays partage ce déficit historiographique, Cahors semble particuliérement négligé.

Le panorama des vignobles du Haut-Pays dressé par Jean-Pierre Poussou, de la seconde moitié du XVIIe á la fin du XIXe siécles, est pour nous trés précieux. Son objectif est de corriger la perspective tracée par Roger Dion en 1959 dans sa somme sur l'histoire de la vigne et du vin en France, á la lumiére des travaux réalisés depuis.2 L'absence de synthése et le manque patent de monographies sur les vignobles concernés n'empéchent pas l'auteur de souligner trois faits qui contextualisent le cas de Cahors et permettent de poser de nouvelles questions. D'abord, les priviléges de Bordeaux n'ont pas déterminé toute l'histoire. Ils n'ont pas empéché l'expansion continue et généralisée des surfaces en vigne situées en amont, contrairement á l'idée selon laquelle Bordeaux aurait tant serré le débouché que ces vignobles se seraient éteints ou convertis, sauf exception - comme Cahors. Les plaintes envoyées par ces vignobles ont fait perdre de vue l'importance des marchés urbains de proximité, des populations des montagnes, des prospections lointaines directes ou du contournement par roulage pour écouler cette production de masse. Qu'en fut-il pour Cahors ? Deuxiéme fait : la différence avec Bordeaux tient moins aux quantités produites qu'aux qualités, mais de ce dernier point de vue, les évolutions sont fort contrastées á l'époque moderne au sein des vignobles du Haut-Pays. Forts de leurs capacités d'investissement, les grands cháteaux bordelais de Médoc et de Graves se sont exclusivement consacrés á la viticulture et ont lancé la marche vers la qualité pour servir une clientéle d'élite tandis que les vins de haut étanchaient la soif du petit peuple. Pour autant, certains vignobles du Haut-Pays ont construit et consolidé une réputation nationale voire internationale. Si les priviléges de Bordeaux n'ont pas effacé les vignobles du Haut- Pays, il n'est pas étonnant qu'ils n'aient pas effacé ceux qui offraient des productions de qualité. La présence de vignobles ou de productions de qualité n'est donc plus aussi paradoxale ou énigmatique qu'elle pouvait l'étre pour Roger Dion. Reste á comprendre comment se construit et se consolide la qualité dans un vignoble tel que celui de Cahors. A la faveur de quels investissements, de quelles consommations ? Troisiéme et dernier fait : si le rouge et la production orientée vers la distillation dominent dans le Haut-Pays, les vins blancs sont aussi trés valorisés. Lá encore, comment se positionne Cahors ?

Par rapport á la littérature existante sur les vignobles du Quercy et de Cahors en particulier, notre ambition est de tester la robustesse de certaines assertions, de compléter les connaissances sur les terrains déjá travaillés, et de décaler les perspectives pour faire apparaítre d'autres réalités. Sur ce dernier point, pour résumer, nous voyons trois orientations principales, pour ne pas dire biais, dans les travaux qui ont été faits jusqu'á présent : Bordeaux, les grands hommes (de pouvoir, de commerce, de lettres), le rouge. Nous ne disons pas que ces trois orientations sont injustifiées ou mauvaises. Nous disons qu'elles méritent d'étre questionnées. L'accent mis sur la relation á Bordeaux masque l'enjeu de l'autoconsommation, du marché local, urbain, de Cahors, des marchés en amont de la riviére Lot, de la place du vin dans une économie du troc. Il ne dit rien de l'impact de la place de Cahors et de ses propres priviléges pour les productions d'autres vignobles. L'histoire racontée du point de vue des grands hommes laisse sans voix la foule des petits, avec leurs pratiques culturales, leurs spéculations et leurs espoirs. Elle ne porte pas son regard sur les relations sociales quotidiennes ou saisonniéres nouées autour du vin. On peut se demander si le vin noir si fameux n'a pas évolué au cours du temps, qualifiant initialement un vin particuliérement sombre, tel qu'il devint apprécié des Anglais et des Hollandais á l'époque moderne (Wegener, 2004), puis au XIXe siécle un vin concentré par chauffage et destiné essentiellement au coupage. Il ne saurait en outre faire oublier le goüt médiéval pour le blanc et les aptitudes du terroir quercynois pour ce type de production (Foissac, 2014 : 134). Quid par ailleurs de ce « vin rosé » qui se « composait avec un tiers d'auxerrois et deux tiers de raisins blancs, ou autres bonnes espéces » (Analyse, 1837 : 104), ou encore du rogomme et autres vins cuits, qui semblent avoir aussi beaucoup contribué á la fortune du vin de Cahors en Russie ?

Disons pour résumer qu'á une approche essentialiste présentant les aléas d'un vignoble ou d'un vin de Cahors, au singulier, donné par la nature (un cépage, un terroir), ou naturalisé dans sa grandeur par l'histoire, nous préférerons une approche constructiviste dans laquelle la définition méme du vignoble et du ou plutót des vins se construit et évolue au cours du temps. Les premiers échanges avec l'interprofession de Cahors ont fait apparaítre que la perspective initiale de valider voire d'approfondir un récit local connectant á tout prix le vin de Cahors á la grande histoire n'était pas la plus pertinente, ni du point de vue historien, ni du point de vue commercial, dés lors qu'il s'agit de construire un discours et un produit fondés sur l'authenticité. La nécessité d'une remise á plat des connaissances s'impose, accompagnée d'une conversation oú les différents points de vue feront progresser mutuellement les questionnements.

 

Conclusion

Le cas de Cahors, á la fois représentatif et original, par sa réputation ancienne et sa capacité de résilience face aux crises, éclaire un pan entier de l'histoire de la viticulture en France depuis le Moyen Age, celui des « vins de haut », restés dans l'ombre de Bordeaux.

Dans le débat entre ceux pour qui prime la géologie ou la géographie physique, combinant sols et climat, et ceux pour qui c'est la géographie humaine, l'histoire (les hommes qui ont inventé leur terroir, comme on invente un trésor - il est lá, encore fallait-il le trouver, l'exprimer), cet article verse au chapitre de la seconde interprétation en montrant comment au XXe siécle, l'histoire entendue comme récit du temps passé a été mobilisée par les hommes pour (re)inventer leur terroir. Le passé des hommes a été intégré comme composante du terroir pour lui donner une appellation et le faire connaítre. En forgant un peu le trait, on pourrait dire autrement que l'histoire a occupé la place du sol comme déterminant de la vocation viticole qualitative de Cahors au XXe siécle, jusqu'aux années 1990. Ou plus exactement, le déterminisme de l'histoire, vouant la région á la production d'un vin de qualité, a précédé le déterminisme du sol, difficile á stabiliser quand le vignoble changeait de localisation. De maniére exemplaire, le livre de José Baudel, déjá abondamment cité, commengait par l'histoire, avant de présenter les sols. La démarche plait á l'historien dans la mesure oú on peut en inférer que se sont les hommes qui donnent sens á la géologie. Mais elle le géne quand elle gomme les contingences et pointe trop fermement une direction, en excluant les alternatives. Or, c'est bien á cela que sert le déterminisme, qu'il soit historique ou pédologique : donner un sens, donner le sens, pour canaliser les actions humaines.

 

Notas

1 Entretien de Léonard Laborie avec Pierre-Jean Pébeyre, Cahors, 16/05/2014.

2 Á propos du traitement des vins du Haut-Pays par Roger Dion, Jean-Pierre Poussou écrit : « les pages qu'il leur consacre et la maniére dont il les présente, ne peuvent plus nous satisfaire aujourd'hui, sans que cela soit une critique. D'une part il avait beaucoup á faire, et il pouvait légitimement considérer qu'il devait avant tout se consacrer aux vignobles les plus importants. D'autre part il disposait de beaucoup moins de travaux que nous, encore qu'á cet égard on soit obligé de rappeler que ces vignobles n'ont toujours pas été suffisamment l'objet de l'attention qu'ils méritent » (Poussou, 2010 : 187).

 

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Recibido: 15-9-2015 Aprobado: 30-11-2015

 


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